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Devenir antiquaire ? Quelques conseils utiles

"Il m’est arrivé de me prendre des portes dans la figure" (Filip Devroe, antiquaire).

Une armoire remplie d'atlas, de cartes et de gravures, un brouhaha permanent, des va-et-vient, un touriste par-ci par-là… Le métier d’antiquaire semble hors du temps. Est-ce réellement le cas ? En quoi cette profession consiste-t-elle ? Voici ce qu’il faut faire et ne pas faire si vous voulez devenir antiquaire…

Izegemnaar Filip Devroe (70 ans) tient le magasin d’antiquités Sanderus depuis quarante ans. D'abord installé à Courtrai, il est désormais installé sur le Nederkouter à Gand, et ce depuis maintenant 23 ans. "J'ai travaillé comme informaticien chez Bekaert mais je collectionnais déjà des livres, des manuscrits et des cartes. À un moment donné, je suis devenu antiquaire à mi-temps. J’ouvrais d’abord le soir et proposais une modeste collection de gravures principalement locales, d'annuaires... Ce fut le début d’une carrière longue de plus de 40 ans."

Lieu

"Désormais, je ne choisirais plus un emplacement dans le centre", explique Filip Devroe. "La plupart des clients viennent sur rendez-vous. Les visiteurs occasionnels sont souvent des touristes en short qui ne font que jeter un rapide coup d’œil. En revanche, avoir uniquement une boutique en ligne ne suffit pas. Les clients doivent pouvoir sentir, regarder, consulter des ouvrages de référence mais un tel espace n'est plus nécessaire dans le centre-ville."

Se spécialiser

Aucun antiquaire ne se ressemble, explique Filip Devroe. Chacun a sa propre spécialité. Littérature, premiers manuscrits, sciences, histoire naturelle, incunables, art... "Nous sommes spécialisés dans la topographie, à savoir de très bonnes cartes et des livres de qualité. Les atlas complets de Sanderus, Mercator ou Ortelius ne se trouvent qu'aux Pays-Bas, à Paris et à Londres. Se spécialiser est indispensable pour survivre dans le secteur. Nous avons toujours investi dans des collections. Après 40 ans, vous obtenez des résultats même si cela demande parfois de prendre des risques et de se retrouver avec un livre acheté relativement cher mais qui ne trouve pas preneur. Il est question d'investissements à long terme."

Chefs-d'œuvre

"Petit à petit, j'ai participé à des foires de plus en plus intéressantes au Pays-Bas, à Londres, à Paris, à New York et à Miami", poursuit Filip Devroe. "A l’époque, ces foires étaient plus intéressantes. Le développement d’Internet a pour conséquence que les collectionneurs savent désormais parfaitement ce qui est à vendre. Il n'y a plus de surprises, le marché est totalement transparent. Faire des affaires est presque impossible. Tout le monde recherche les pièces les plus rares, Internet stimule la concurrence entre les salles de vente telles Sotheby’s, Christie's, Drouot et les prix atteignent parfois des montants exorbitants. Cela rend le secteur très capitalistique."

Réseautage

"Les plus belles pièces ne peuvent être trouvées que grâce à un vaste réseau personnel. Vous devez connaître des gens ! Ensuite, moins la pièce est rare, moins vous gagnerez d’argent. Je pense par exemple à un Atlas Maior de Blaeu (1662) ou une Flandria Illustrata, une œuvre historiographique et cartographique de 1641 dessinée par Antonius Sanderus. Le prix actuel équivaut à un tiers de celui payé il y a 40 ans. J’ai cinq pièces qui attendent de trouver preneur alors qu’elles partaient rapidement il y a quelques années. Résultat des courses : les antiquaires qui peuvent acheter et vendre de précieux imprimés anciens continuent d’exister. Ceux qui ne peuvent pas le faire sont des oiseaux pour le chat et disparaissent.

Ouvrages de référence

"Ce dont vous avez besoin, ce sont de bons ouvrages de référence", insiste Filip Devroe. "J’en ai un placard dans lequel se trouvent notamment la nouvelle série d'atlas hollandais historiques de Cornelis Koeman retravaillée par Dr. Peter Van der Krogt ou encore le Monumenta Cartographica Neerlandica du DR. Günter Painter. Vous avez vraiment besoin de ce genre de pièces pour prouver votre expertise et booster vos ventes. Certaines personnes indiquent même combien de copies d'une carte sont connues dans le monde. Cela vous donne une certaine crédibilité dans le secteur."

Envie de vendre

"A l’époque, je possédais un manuscrit provenant de Bologne et datant de 1280 sur lequel j'ai écrit une publication. Une pièce d’exception, le top du top. J'ai longtemps regretté de l’avoir vendu. Si je pouvais aujourd’hui mettre la main sur le manuscrit de Gruuthuuse (manuscrit médiéval, compilé à Bruges en 1395) avec ses textes en néerlandais de l’époque, je le garderais sans hésitation (rires)."

Formation

"Je suis moi-même parti de zéro et j'ai acquis toutes mes connaissances de manière autodidacte. Le virus a contaminé mes fils Brecht et Dieter. Ils sont actifs dans l'entreprise. Brecht, l'aîné, a montré beaucoup d'intérêt depuis son plus jeune âge et a également étudié l'histoire de l'art. Il voyage actuellement en Argentine, gère le marché mondial et a un très bon réseau de contacts. Mes deux enfants sont des puristes et ne recherchent que des collections complètes et authentiques, sans pages manquantes ou rajoutées par la suite. En effet, le commerce de pages d’Atlas en vrac prend de plus en plus d’ampleur mais cela ne les intéresse pas."

Rester calme

En plus d'Internet et des prix exorbitants, les gouvernements nous mettent aussi des bâtons dans les roues. "En France, par exemple, l'Etat a droit à la dernière enchère", peste Filip Devroe. "Il est difficile d'exporter des documents de nombreux pays. Cela implique une paperasse administrative conséquente. Certains fonctionnaires et/ou douaniers sont peu conciliants. Notre travaille exige une certaine résistance au stress. Je sais par exemple qu'une lettre de Christophe Colomb se trouve actuellement quelque part en Allemagne mais je n'obtiendrai jamais de licence d'exportation donc je ne l'achète pas. C’est dommage mais la vie continue. La profession d’antiquaire est vraiment merveilleuse."

(wdh/eh/ll)

31 janvier 2020
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