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Travailler en pleine crise du coronavirus : témoignage de Vanessa, infirmière en soins intensifs

Vanessa Vermoens (50 ans) de Asse

  • Études : soins infirmiers
  • Profession : Infirmière à l'unité de soins intensifs de l'UZ Brussel
  • Vie privée : mariée
En cette période de crise du coronavirus, alors que les gens sont appelés à rester chez eux le plus possible, Vanessa Vermoens (50 ans) travaille sans relâche pour sauver des vies. En tant qu'infirmière à l'unité de soins intensifs de l'UZ Brussel, elle est quotidiennement en contact avec des patients atteints du Covid-19.

En quoi consiste votre travail d'infirmière à l'unité de soins intensifs ?

Vanessa : "Les patients en soins intensifs sont généralement atteints de pathologies graves. Il peut s’agir de personnes venant de subir une intervention chirurgicale conséquente, ayant été victimes d’un accident vasculaire cérébral ou impliquées dans un grave accident de la route et luttant pour survivre. En tant qu'infirmière, mon rôle est de surveiller de près l'état du patient, de prodiguer les soins nécessaires et, bien sûr, d’informer la famille de l’évolution de la situation. Nous travaillons généralement par shifts de douze heures, ce qui est parfois éprouvant tant d’un point de vue physique que mental."

Ces dernières semaines, de nombreuses personnes ont été admises aux soins intensifs à cause du coronavirus. Est-ce également le cas dans votre hôpital ?

Vanessa : "En effet. Le service au sein duquel j’évolue a été complètement réorganisé pour faire face au Covid-19. Nous ne traitons plus que des patients qui ont contracté le coronavirus et dont l’état de santé est critique. Certains peuvent encore respirer tandis que d’autres sont sous respirateur et placés dans un coma artificiel. Nous ne traitons pas uniquement des personnes âgées. J’ai déjà soigné un homme âgé d'une quarantaine d'années et mon mari, qui travaille dans une autre unité de soins intensifs, s’est occupé d’un patient de 32 ans. Cela rend le quotidien difficile à vivre d’un point de vue émotionnel."

La crise du coronavirus a-t-elle affecté votre manière de travailler ?

Vanessa : "Absolument. La plupart d'entre nous travaillons par shifts de douze heures. Nous commençons à 7h15 du matin et terminons à 19h45 le soir mais, depuis peu, nous devons effectuer des heures supplémentaires. Nous ne quittons notre service que trois fois par jour car nous devons être prudents avec le matériel de protection que nous portons pour nous protéger ainsi que les patients. Le matin pour prendre une bouffée d'air frais ou pour aller rapidement aux toilettes, le midi pour déjeuner et enfin l’après-midi pour une pause express. Chaque fois que vous quittez le service, vous devez jeter votre masque, vos gants et votre tablier de protection dans une poubelle spéciale. Qu’est-ce qui est le plus difficile à vivre actuellement ? La solitude des patients car les visites ne sont actuellement pas autorisées. Je sais ce que c'est que d’avoir un membre de sa famille aux soins intensifs. Mon mari a été plongé dans un coma artificiel il y a quelques années mais j’étais autorisée à lui rendre visite. C'était pénible à voir. Nous essayons de tenir les membres de la famille des patients bien informés. Une sorte de centre d'appels a été mis en place au sein du service, où deux personnes ne font rien d’autre que de surveiller l'état des patients et appeller leurs proches pour les tenir informés. Heureusement, des psychologues sont toujours disponibles pour toute l'équipe si nous traversons des soucis d’ordre émotionnel."

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Votre vie privée est-elle impactée par cette crise ?

Vanessa : "Après une journée de travail, je suis complètement épuisée. Heureusement, je tiens le coup pendant la journée car de l’adrénaline coule dans mes veines et je n’ai pas le temps de penser à mon état de fatigue. Mais quand je suis à la maison, j'ai à peine le temps de prendre l’air et m’allonger devant la télévision qu’il est déjà temps de dormir et prendre des forces pour être opérationnel le lendemain matin (rires). Mon mari et moi essayons également de respecter les mesures de distanciation sociale. Au début de la crise, j'ai soigné un patient dont l’état de santé s'est soudainement détérioré. Il s'est avéré par la suite qu’il était porteur du coronavirus. Il y avait donc une chance réelle que je sois infectée. J’ai dès lors demandé à mon mari de ne pas trop s’approcher de moi et nous avons même dormi séparément pendant quelques temps. Vu que mon mari travaille aussi dans les soins de santé, autant éviter de prendre des risques inutiles…"

La crise du coronavirus durera-t-elle encore longtemps ?

Vanessa : "Je pense que oui, surtout dans notre département. Les patients admis aux soins intensifs y restent généralement plus de deux semaines. Même s’il n’y a aucune admission pendant trois semaines, les patients arrivés précédemment auront encore besoin de soins de notre part pendant un certain temps."

Pensez-vous – une fois l’épidémie sous contrôle – que votre travail sera le même qu'auparavant ?

Vanessa : "Je pense que nous serons plus prudents à l’avenir. Mettre spontanément un masque buccal, se laver plus souvent les mains,… Une chose est sûre : notre équipe sera sans aucun doute plus forte et plus soudée que jamais. On le sent déjà, tout le monde est sur le même pied d'égalité. Que vous soyez responsable de la maintenance, de la logistique ou chef de service, chacun est apprécié pour ses qualités. Nous nous adressons maintenant tous les uns aux autres par notre prénom. Cela égaye le quotidien et stimule la productivité."

Quels bons conseils aimeriez-vous donner aux personnes qui vous lisent ?

Vanessa : "Respectez les règles. Lavez-vous régulièrement les mains, gardez vos distances et restez à l'intérieur si vous n'avez pas besoin d'être à l'extérieur. Vous vous protégerez, mais rendrez aussi service aux personnes qui vous tiennent à cœur."

(em/eh)

10 avril 2020
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